Les politiques doivent savoir jusqu’où ne pas aller trop loin, à l’image de parents confrontés à un ado buté, aveuglé par un romantisme béat qui le pousse à mettre sa vie en danger. Il est temps de mettre un terme à la plaisanterie Notre-Dame-des-Landes. Certes il n’y a pas encore eu de mort en Loire-Atlantique, mais le drame de Sivens est une alerte qu’il faut savoir entendre.
Dans un conflit, le fait d’avoir raison n’est pas toujours un argument suffisant pour l’emporter. Et il y a bien longtemps que l’on est sorti, dans cette affaire, de la confrontation rationnelle. Pour avoir assisté il y a deux ans à la tentative d’expulsion de zadistes perchés à dix mètres du sol, je crois pouvoir témoigner du fait qu’une partie de ces jeunes gens est prête à mettre sa vie en jeu pour un champ de patates. Il faut savoir les protéger d’eux-mêmes.
Certes cette plaisanterie va coûter un bras à la collectivité et donc au contribuable – sans doute plus que si l’aéroport avait été construit – certes Nantes va souffrir à terme d’un aéroport enclavé, comme la ville souffre aujourd’hui d’une gare implantée en dépit du bon sens au milieu du XIXéme, mais c’est ainsi, on est sorti du champ politique pour entrer dans le champ religieux.
On peut déplorer qu’une jeunesse déboussolée préfère s’indigner pour un morceau de bitume dans une prairie à vaches que de lutter, par exemple, contre l’esclavagisme en vigueur chez les producteurs de leurs propres vêtements, mais d’évidence cela ne sert pas à grand-chose. Seul le temps permettra de mettre en perspective la vacuité de cette lutte, ne serait-ce qu’au regard des véritables enjeux environnementaux.
L’abandon de Notre-Dame-des-Landes ne mettra évidemment pas un terme au développement du transport aérien, moins polluant que l’automobile – il peut sembler idiot de le rappeler -, il provoquera tout juste un peu plus d’étalement urbain et pourrira un peu plus la vie des Nantais. Mais ce n’est, somme toute, pas un drame. La société du spectacle et des clowns tristes a gagné.
Laissons les retourner à leurs cabanes dans les arbres, leurs champs de carottes et laissons-leur briser quelques vitrines pour fêter cette grande victoire contre le « capitalisme triomphant ». On se nourrit des caricatures que l’on peut. Rien ne remplace l’expérience, et la seule bonne façon de sortir de cette histoire par le haut est de placer ces jeunes gens devant leurs propres contradictions et d’observer la « commune libre » qu’ils entendent instituer à Notre-Dame-des-Landes. Il est possible qu’il soit plus difficile de construire que de détruire.
Photo : le figaro.fr